Nous, usagers des services publics, issus de l’immigration et habitants en grand nombre des quartiers populaires, nous nous élevons aujourd’hui contre la situation catastrophique des services publics qui n’en finissent plus de se désertifier, de se délabrer, et de nous discriminer. Si les discriminations font système dans ce pays, le rôle des services publics pourrait être au moins de les atténuer, par des financements volontaristes ou par des mesures prioritaires. Or, ce sont précisément ces moyens de "compensation"qui sont aujourd’hui démantelés.
Il n’est que de regarder l’état du 93 où la relégation, la précarité,le chômage, le mépris, les discriminations, les violences et l’insalubrité atteignent des sommets de honte. Ces réalités envahissent pourtant le quotidien de populations qui sont parmi les plus démunies de ce pays. Ce sont autant d’injustices auxquelles les services publics ne remédient pas, quand l’incurie de leur gestion ne les laisse pas tout simplement pourrir. D’ailleurs, le désengagement des autorités est tel – de l’aveu même de certains fonctionnaires et de leurs syndicats – que c’est l’accès même à ces services publics qui est remis en cause aujourd’hui pour les personnes les plus précaires.
Nous appelons donc à une mobilisation massive et déterminée car nous en avons assez devoir se déployer devant nos yeux cette gestion coloniale des quartiers,
Assez de voir nos hôpitaux et leurs services se détériorer dangereusement, être toujours plus saturés et toujours moins aptes à assurer leurs missions,
Assez de subir les conséquences de suppressions massives d’emplois administratifs dans l’ensemble des services publics de proximité comme la Poste, la protection sociale, Pôle emploi, les finances publiques ou l’énergie,
Assez de constater qu’en parallèle de ces régressions, le déploiement sécuritaire ne fait, quant à lui, que de se renforcer, et qu’on voit fleurir des commissariats là où nous aurions davantage besoin d’hopitaux en bon état et de points d’accueils administratifs,
Assez de voir que le dématérialisation administrative censée faciliter les démarches ne se soucie aucunement, par exemple, des populations maîtrisant mal le français,se voyant dés lors contraintes de se déplacer dans des points d’accueils envoie de disparition, au prix de longues et douloureuses files d’attente,
Assez de voir nos collectivités – souvent les plus pauvres - toujours moins dotées,toujours moins aptes à nous soutenir, toujours moins en mesure de nous servir,
Assez de voir nos enfants être scolarisés dans des établissements hypocritement classés en « éducation prioritaire » alors que l’Etat – suivant le sens de ses « priorités » - dépense deux fois plus d’argent pour la scolarité d’un élève parisien que pour celle d’un élève du 93,
Assez de voir la répression s’abattre sur les lycéens, les étudiants et les enseignants dès lors que ces derniers dénoncent les injustices et tentent de s’organiser.
Assez de voir la laïcité instrumentalisée à des fins racistes, islamophobes et discriminantes, excluant encore et toujours les mêmes personnes de l’école et de l’accès au savoir.
Assez de voir que, faute de remplacements, des élèves de Seine Saint-Denis perdent jusqu’à une année entière de cours tout au long de leur cursus, jusqu’au baccalauréat,
Et avec cela, nous sommes plus que jamais révoltés de constater qu’après une scolarité qui ne leur a en rien été facilitée, nos bacheliers sont aujourd’hui condamnés à suivre la loi de Parcoursup et de son algorithme qui les discrimine– même les plus brillants - dans l’accès aux universités parisiennes et aux grandes écoles. Car nous n’oublions pas que toute cette génération née dans les années 2000 – notamment en banlieue – a été constamment déconsidérée voire oubliée par des pouvoirs publics qui n’auront jamais construit les écoles et universités pour les accueillir. Aujourd’hui, les élèves de banlieue et des quartiers populaires sont les premiers à payer le prix de cet abandon, les premiers sacrifiés.
Face à des services publics qui ne cessent donc de nous discriminer,qui assurent de moins en moins leurs missions à nos égards, qui abandonnent les populations les plus démunies et qui menacent plus que jamais la formation et l’avenir de nos enfants, nous vous appelons à vous mobiliser :
Le 30 novembre 2018,contre le racisme et les inégalités sociales, on disparaît de nos lieux de travail, de nos facs, de nos écoles, des réseaux sociaux, des lieux de consommation.
Et le 1er décembre,on réapparaît sur toutes les grandes places des villes, pour exiger Egalité et Dignité pour tous et toutes.